J'ai remarqué depuis quelques temps que je ne suis plus aussi
maladroit
qu'avant. J'arrive souvent à récupérer par réflexe un objet qui est en
train de
tomber. Ce n'est pas toujours le cas, et je suis toujours aussi médiocre
pour
attraper un ballon qu'on m'envoie. Mais il y a du progrès. Ce qui est
étonnant,
c'est que je pensais jusque là que c'était une question purement
neurologique. Or, ce
qui m'amène à remettre cela en question, du moins dans mon cas, c'est
que je peux quand même arriver à
maîtriser certaines choses dans certains contextes. Il me semble que
souvent c'est par manque d'attention, car je suis davantage dans mes
pensées que dans mon corps. Le fait est que je suis très habile quand je
fais la cuisine, parce que je me fais plaisir dans cette activité et
que je suis très attentif à ce que je fais. Mais en général, dans un
environnement spatiale plus commun, j'ai davantage tendance à m'enfermer
dans mes pensées et donc à être moins attentif à ce qui m'entoure et
par conséquent à avoir moins de réflexes.
En poussant plus loin cette
réflexion, j'en suis venu à penser que peut-être, du fait que je suis
plus
calme parce que j'ai organisé ma vie pour éviter d'être trop souvent
confronté
à la fatigue et au stress, je peux peut-être réattribuer mon énergie à
certains domaines. Par exemple, rencontrer des gens, changer
momentanément
d'environnement (il y a eu des périodes où j'ai réussi à voyager tous
les mois en dormant chez
des amis) est devenu possible et même facile, car je suis à ma place et
je ne
gaspille plus mes ressources mentales à me demander quelle place prendre
dans
la société.
En étant en général moins stressé, il est normal que je sois aussi
moins maladroit. Je gère mieux les relations sociales aussi parce que je les
limite dans le temps, que je sais me replier sur moi-même le temps nécessaire
pour récupérer, que je ne travaille plus tous les jours dans un milieu
professionnel qui ne me convient pas. Quand mon séjour chez des amis devient
trop long et commence à me fatiguer, je me rappelle que bientôt je rentrerai
chez moi, que je retrouverai ma nourriture préférée, mon lit, mon silence. Je
me projette mentalement chez moi et cela me donne la force de supporter les
quelques jours qui restent avant mon départ. Et puis je me rappelle que le
temps passé hors de chez moi doit être employé pour le mieux, je veux le faire
fructifier, que ça serve à quelque chose, car chez moi, je serai davantage limité,
alors quitte à être là, autant en profiter au maximum !
Dans les relations
sociales aussi, je découvre ma capacité, certes assez faible il me semble, mais
qui a le mérite d'exister, à pouvoir agir en réponse à une intuition, à me
laisser porter, à me laisser vivre la relation à l'autre, sans tout vouloir
contrôler, sans tout vouloir comprendre (du moins pas tout de suite), pour
simplement expérimenter l'instant présent, comme font la plupart des gens. Ce
n'est pas habituel pour moi, mais c'est agréable de vivre un peu de
l'expérience de vie des gens « normaux ».
Il me semble important de bien se connaître, pour savoir ce que l'on
peut
faire ou pas, car en soi, on peut presque tout faire car on est tous
capable de dépassement, mais pas longtemps et pas dans tous les domaines
en
même temps. Il faut connaître ses ressources intérieures et les gérer
pour le
mieux afin de trouver un équilibre qui rende heureux dans des activités
quotidiennes qui nous conviennent, même si ça ne convient pas aux
autres.
Il faut peut-être revoir notre conception du monde, se demander ce qui est
vraiment utile pour nous, ou pas, arrêter de se calquer sur un modèle sociale
commun pour adopter un modèle social spécifique et personnel. Quand on a
supprimé tout le superflue de notre vie, il nous reste les obligations. Mon
« truc » est de savoir trouver, dans ce qu'il m'est imposé de faire,
des aspects positifs et amusants. Par exemple, faire mes comptes demande une
certaine logique, de l'analyse, de la concentration, afin de bien gérer mon
budget. Recevoir les amis de mes enfants à la maison ne relève pas de ma
responsabilité mais de la leur, donc je m'en décharge et ça me pèse moins.
Donc il y a trois aspects :
1 :
réduire mes activités à ce dont j'ai vraiment besoin
2 : trouver un aspect
attrayant à une chose ennuyeuse
3 : me décharger de mes responsabilités
dans la mesure du possible.
Il faut aussi remarquer
que lorsque je suis stressé (surtout par une rencontre peu habituelle), je me
mets à faire du flapping, je deviens plus maladroit. C'est le manque
d'assurance qui génère chez moi ces particularités comportementales. Quand j'ai
pu expérimenter que je sais faire, que je peux faire, alors naturellement je
suis plus tranquille et moins maladroit, en acte et en parole aussi.
Mais passer inaperçu socialement est « facile » seulement durant un
temps. J'ai
eu l'occasion de faire un bilan médical qui a duré trois heures. Les
deux
premières heures j'assurais, j'avais l'esprit tranquille et j'imagine
que je devais avoir l'air comme tout le monde, mais après deux
heures, je commençais à parler en regardant ailleurs, sur un ton
monocorde, en
me balançant, car je n'arrivais plus à maintenir les apparences. Il ne
faut pas
se leurrer, ce n'est pas un acquis. « Chassez le naturel, il revient au
galop ».
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